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Un labyrinthe dans la ville

Un labyrinthe dans la ville

Blog d'une brestoise: Coups de gueule, événements, humour, photos, poèmes, politique, projets de romans, et réflexion.


Singer l'handicapé.e

Publié par Le Labyrinthe sur 20 Mai 2018, 17:16pm

Catégories : #Réflexion, #Témoignage, #Autisme, #Psychophobie, #Violence Scolaire, #Humour

De temps en temps, je vois des personnes imiter une personne handicapée mentale, sur mon lieu de formation ou quand je travaillais dans les écoles par exemple... Je dois en oublier.

Je ne suis pas sûre, d'ailleurs, que ce soit toujours fait exprès ( mais même sans être fait exprès, ça dénote d'un inconscient handiphobe/psychophobe ). Par exemple, quand une personne se balance d'avant en arrière, pour illustrer le fait qu'elle en a marre d'une chanson qui lui tape sur le système.

Se balancer, c'est un geste que je fais tous les jours, parce que j'en ressens le besoin, c'est une habitude, un rituel, dû à mon autisme ( même si ça ne se manifeste pas de la même manière chez toutes les personnes autistes ). Un psy m'avait expliqué que c'était une forme de compensation d'un sens que nous avons moins que les neurotypiques ( "sens vestibulaire" -c'est à dire le sens de l'équilibre- ). C'est aussi un moyen de faire face au stress.

Je suis interloquée de voir des neurotypiques faire un geste que je fais seulement quand je suis seule ou avec ma famille restreinte. Si je le faisais en public, il est clair que des personnes me jugeraient. Mon handicap serait davantage visible. Ce geste, qui ne correspond pas aux normes dominantes, agacerait, gênerait. Je n'ai pas le privilège d'une personne neurotypique, de pouvoir jouer l'handicapée, puisque je le suis. Les neurotypiques n'ont pas peur de passer pour ce qu'iels ne sont pas. En tant qu'handicapée, je peux craindre une forme d'outing. 

Imiter, singer, les personnes handicapées, c'est une forme de violence discriminatoire envers elles. Tout comme des personnes, souvent des hommes, singent les gays, ce qu'on peut entendre dans la chanson d'Aznavour, "comme ils disent":

"On rencontre des attardés
Qui pour épater leurs tablées marchent et ondulent
Singeant ce qu'ils croient être nous
Et se couvrent, les pauvres fous, de ridicule
Ça gesticule et parle fort.
Ça joue les divas, les ténors de la bêtise."

Chaque jour, en tant que personne autiste, par exemple ( je parle de ce que je connais le mieux ), nous devons nous adapter, faire des efforts, "sortir de notre zone de confort" ( pour nous, ce concept à la mode n'est pas une option... ne pas sortir de cette zone revient à rester chez nous et parler à personne ). Nous apprenons les normes et codes des neurotypiques, au fur et à mesure, nous les appliquons plus ou moins, pour être accepté.e.s par la société. Au point d'être parfois, plus royalistes que le roi. 

Quand une personne neurotypique se balance, c'est considéré comme drôle. Quand c'est une personne réellement handicapée, c'est gênant. Bah oui, le jouer, c'est ridiculiser des gens, c'est bien plus drôle que l'être. 

Peut-on parler d'une forme d'appropriation culturelle? C'est possible. De la même manière qu'une personne noire avec des dreads est discriminée, une personne blanche qui fait la même chose l'est beaucoup moins. On adopte un code d'un groupe, sans adopter les discriminations qui vont avec. L'exemple du déguisement amérindien correspond mieux pour montrer l'aspect "ridicule". On va ridiculiser une tenue qui ne l'était pas à la base, de la même manière que se balancer n'est pas ridicule en soi, mais juste inhabituel, donc hors des normes dominantes 

Dans les écoles, c'est encore plus difficile. Je me souviens que "mongol" était une "insulte" courante et que pour singer la personne handicapée, on grogne, roule les yeux et bave. On considère la personne handicapée toujours comme une personne débile, on considère que ça se voit sur la tête, et que donc, on peut rire de cela sans qu'une personne concernée ne l'entende, puis que c'est dégradant pour une personne qui n'est pas handicapée, d'être traitée de ce type de qualificatifs.

J'ai déjà entendu "autiste" comme insulte, aussi. Alors que ça ne devrait pas en être une: c'est ce que nous sommes, et je ne vois pas pourquoi nous devrions avoir honte. Ce sont les gardiens du temple de la norme, qui devraient avoir honte. Iels perdent leur temps de vie précieux à se moquer des autres, les critiquer, les mettre dans des petites boîtes, juste dans le but, de passer pour "normales", d'avoir une vie "normale", des ami.e.s normaux, des préoccupations normales, des opinions politiques normales, être à la mode, etc. Quel intérêt? Sont iels seulement heureuses.x?

Le pire, dans tout cela, c'est que les adultes ne montrent pas ou peu l'exemple. Elleux aussi, peuvent se moquer des élèves qui ont un handicap mental, les considérer comme inférieurs, les mépriser... 

Ce ne sont pas simplement des moqueries, pas simplement de l'humour. C'est une idéologie de rejet des personnes handicapées, considérées comme des sous-humains. 

D'ailleurs, un formateur a dit clairement qu'on aurait du supprimer Einstein, juste après que j'évoquais le fait qu'il a parlé à un âge tardif et qu'il était mauvais à l'école, tout en étant un esprit brillant, très intelligent. Un propos très violent, auquel je n'ai pas su que répondre. Par prétexte d'humour ( mais était ce de l'humour? je ne sais pas... ), on peut vraiment dire toutes les horreurs du monde... 

En tous cas, ça ne me fait pas rire, parce que je n'oublie pas que des personnes handicapées ont été assassinées dans les camps de la mort, pendant la seconde guerre mondiale. Je n'oublie pas que nombre d'entre nous étaient caché.e.s, car c'était une honte, d'avoir un enfant avec un handicap, on avait certainement commis un pécher ( avant, on estimait que le handicap ou la maladie était une punition divine, les parents se sentent toujours souvent "coupables" aujourd'hui, mais plus pour des raisons religieuses -en tous cas, pas conscientes- ). Je n'oublie pas, qu'encore aujourd'hui, il y a des personnes autistes dans les hôpitaux psychiatriques, alors que ce n'est pas du tout leur place. Je n'oublie pas que beaucoup de personnes handicapées se suicident

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dedennet-tre on gant da doare da sentout ar fent. c'hoarzhin diwar-benn tout zo mil-a-bouez evidon. Skrivet 'meus dit dija diwar-benn ar fent... Sur, ma doare da welout n'eo ket memes eget da hini... Ha dedennus eo an eil. Met perak ???<br /> Pok
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